L’Experte 16H44
Il y a quelques années, Justine Ferlin était juriste pour une grande entreprise de la distribution. Cette situation aurait pu rester la sienne bien longtemps si Justine n’avait pas à ce point le goût de l’aventure et l’envie d’explorer la multitude d’opportunités que le monde d’aujourd’hui a à offrir.
Renonçant à une certaine stabilité, Justine s’envole donc pour un voyage qui l’a menée de Sydney jusqu’à Cairns en passant par le Cambodge, cueillir des cerises en Tasmanie ou s’occuper d’un refuge pour kangourous en Australie.
A son retour en France, il lui faut trouver une nouvelle mission dans laquelle s’épanouir. Trouver un projet qui a du sens lorsque l’on rentre riche d’une expérience à travers le monde n’est pas aisé, mais aujourd’hui Justine Ferlin met sa rigueur et son énergie lumineuse au service de la construction d’une communauté réunissant ceux qui souhaitent intégrer autrement le monde professionnel.
Elle nous raconte le Monde Après.
16h44 invite tous ceux qui souhaitent réconcilier projet personnel et professionnel à la rencontrer !
Justine, en quoi consiste cette communauté que tu crées depuis un an et qui remporte déjà l’adhésion de nombreux entrepreneur(e)s ?
Il s’agit d’ouvrir l’antenne lilloise de l’entreprise parisienne « Le Monde Après », de la société de portage salarial OpenWork, basée en plein coeur de Lille. C’est-à-dire de renouveler l’expérience réussie en région parisienne.
A qui est destiné ce concept ? Les lecteurs et lectrices de 16h44 sont-ils des membres potentiels de la communauté professionnelle du “Monde Après” ?
A vrai dire, la réussite de ce concept, que ce soit le nôtre ou celui d’initiatives similaires, tient au fait qu’il correspond à une attente profonde de personnes de plus en plus nombreuses.
Si l’on voulait esquisser une typologie, elle se composerait :
– des salariés qui aiment leur activité mais qui ne trouvent plus leur compte dans un lien hiérarchique classique, devenu (même pour certains managers qui l’exercent) dénué de sens et inopérant. Ils souhaitent s’en affranchir et travailler pour eux-même, tout en conservant le statut de salarié qui leur convient.
– des entrepreneurs libéraux qui ne ressentent pas le besoin de créer une structure formelle, car une structure légère les déleste de charges administratives chronophages ou énergivores. Pour eux, le portage salarial apporte à la fois agilité et sécurité.
– de jeunes qui s’ennuient dans une entreprise classique, pour qui le confort d’un CDI semble plutôt ennuyeux et moins passionnant que des expériences professionnelles variées et plus spécifiques. Beaucoup adoptent le portage salarial par envie de liberté.
Qu’ont en commun les personnes qui, depuis un an, font appel à tes services ?
Les personnes que je rencontre ont pour la plupart une envie ardente de développer l’activité qui leur correspond. Elles sont avant tout passionnées et motivées. Il faut beaucoup d’énergie pour lancer une activité, inventer une offre. Pour beaucoup, la liberté de développer sa propre activité va avec un réel besoin d’échange, de rencontre et d’émulations. Échanger des savoirs-faire, des réseaux, avoir des feedbacks, tout cela est très stimulant.
Autrement dit, chacun souhaite s’impliquer à son rythme dans une communauté qui l’enrichit et le renforce, tout en gardant une grande liberté d’agir et une responsabilité intacte quant à son projet.
D’après toi, qu’est-ce qui manque au monde professionnel traditionnel pour donner vraiment envie au salarié de s’impliquer ?
En tant que juriste dans un grand groupe, j’ai pu observer des choses qui me semblent dépassées mais qui sont hélas encore largement en vigueur. Je pense par exemple aux organisations qui multiplient les niveaux hiérarchiques, ou au peu d’autonomie que l’on laisse parfois à des hommes et des femmes qui ont pourtant des formations supérieures. Idem avec les horaires qu’il faut tenir pour le principe et non en prenant en compte le travail à accomplir ou l’efficacité de chacun.
De manière générale, je dirais que c’est la tendance à la sur-réglementation et à la rigidité de principe qui coûte le plus aux organisations traditionnelles. Par ailleurs, je suis convaincue que l’infantilisation génère des comportements infantiles plus qu’elle ne sécurise l’organisation. Qui part travailler avec enthousiasme s’il ne ressent pas la confiance de ses supérieurs et la liberté nécessaire pour accomplir au mieux ses tâches ?
A quoi ressemblera le monde professionnel d’après, selon toi ?
Je crois qu’il est assez proche de ce que j’expérimente et mets en oeuvre chaque jour, à savoir donner la priorité à l’action plutôt qu’au process. Agir, et rectifier ensuite si besoin.
La confiance est une donnée clé du nouveau monde professionnel, lorsqu’elle conduit à l’autonomie et à la liberté pour chacun. Cette confiance qui permet par exemple de mettre en place un télétravail intelligent, souple et flexible, qui permet de trouver un véritable équilibre de vie pour celui qui le vit. Et puis, bien sûr, je ne peux concevoir un monde entrepreneurial joyeux sans projet éthique, sans visions à long-terme qui font sens collectivement et qui animent profondément ses acteurs. Laissons tomber les reporting court-termistes, mécaniques, et finalement assez vides, pour des objectifs intellectuellement et émotionnellement impactants.
Pour le vivre au quotidien avec la communauté Monde Après, je peux témoigner que la force d’une personne ou d’une organisation vient de son alignement. En interne, cela crée un terreau de confiance et de sérénité. En externe, ce terreau génère la satisfaction du client. La cooptation et le bouche-à-oreille fonctionnent bien mieux quand les acteurs travaillent avec plaisir et s’ils sont réellement passionnés par ce qu’ils font, s’ils savent surtout pourquoi ils le font.
L’Application 16h44 :
Faites entrer votre entreprise dans le monde d’après :
- Repensez les règles. Existe t-il des pans de votre organisation dont la réglementation par principe mériterait d’être assouplie, faute de preuve d’efficacité ?
- Faites-vous assez confiance à vos collaborateurs pour augmenter leur autonomie ? Pratiquement, comment étendre cette autonomie ?
- Organisez des discussions pour décider collectivement des formalités du télé-travail, des horaires efficaces, etc. Faîtes-part de vos attentes et de vos envies à vos collaborateurs, écoutez les leurs, co-construisez avec vos collègues.
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